Découvrez l'action subrogatoire : définition, conditions, effets, jurisprudence et exemples. Analyse complète du régime légal et conventionnel, distinctions avec l'action récursoire et le recours personnel, fondements et conseils pour les avocats
L’action subrogatoire est un mécanisme central du droit des obligations qui permet à une personne ayant payé la dette d’autrui de prendre la place du créancier, et d’agir contre le débiteur pour obtenir remboursement. Ce mécanisme opère une véritable substitution de créanciers : le nouvel intervenant (dit subrogé ou solvens) jouit de tous les droits et accessoires attachés à la créance transmise, sans pouvoir obtenir davantage de droits que le créancier initial.
L’article 1346 du Code civil, tel que modifié par la réforme du 10 février 2016, offre une définition générale : « La subrogation a lieu par le seul effet de la loi au profit de celui qui, y ayant un intérêt légitime, paie dès lors que son paiement libère envers le créancier celui sur qui doit peser la charge définitive de tout ou partie de la dette. »
En pratique, cette disposition consacre et élargit la jurisprudence antérieure : la subrogation s’applique dès lors que la personne qui paie a un intérêt légitime à le faire.
Prenons la situation d’un assureur qui indemnise son assuré victime d’un sinistre : l’assureur, une fois le paiement effectué, se retrouve subrogé dans les droits de la victime contre le responsable du dommage. Il peut alors exercer une action subrogatoire en remboursement contre ce responsable.
Elle résulte de la loi, sans accord préalable : la personne qui, ayant un intérêt légitime, paie la dette d’un tiers, devient de plein droit titulaire de la créance à concurrence des sommes versées.
La Cour de cassation admet la subrogation légale dans des cas variés : codébiteurs solidaires, assureurs, notaires ayant indemnisé un dommage, etc. La notion d’intérêt légitime, bien que ouverte à la casuistique, reste l’un des points centraux du régime.
La subrogation conventionnelle se distingue par son origine contractuelle, soit à l’initiative du créancier (ex parte creditoris, art. 1346-1), soit à celle du débiteur (ex parte debitoris, art. 1346-2).
« Le créancier, recevant paiement de la somme due par un tiers au bénéfice du débiteur, déclare subroger expressément ce tiers dans ses droits et actions contre le débiteur, conformément à l’article 1346-1 du Code civil. La quittance est remise en même temps que le paiement. »
La caution peut exercer un recours subrogatoire uniquement si elle a effectivement payé la dette exigible : le paiement doit porter sur une obligation non éteinte et être libératoire.
Le recours subrogatoire est soumis au même délai de prescription que celui dont profite le créancier initial à l’encontre du débiteur principal. Un paiement tardif peut ainsi rendre l’action irrecevable si l’action originelle est prescrite.
La subrogation opère un effet translatif : le solvens devient créancier, à hauteur de sa contribution, et se substitue dans l’exercice de tous les droits attachés à la créance : privilèges, hypothèques, actions judiciaires, etc..
Les droits attachés exclusivement à la personne du créancier initial (ex : certains privilèges publics ou prérogatives personnelles) ne sont pas transférés.
Le débiteur reste en droit d’opposer au subrogé toutes les exceptions qu’il aurait pu opposer au créancier d’origine (nullité, compensation, exception d’inexécution, etc.).
La Cour de cassation rappelle que la caution subrogée peut obtenir le remboursement de la créance principale dans la limite de ce qu’elle a effectivement payé, mais rien au-delà (hors hypothèse du recours personnel).
La caution peut demander non seulement la somme payée, mais aussi les intérêts, frais et dommages et intérêts liés à la procédure ou au préjudice subi.
Celui-ci permet à la caution (ou à toute personne subrogée) de bénéficier strictement du remboursement de la créance principale plus ses accessoires, mais à l’exclusion des prérogatives spécifiques du recours personnel : intérêts au taux légal, refus d’indemnisation de préjudices accessoires.
C’est une action intentée par une personne qui a payé la dette d’autrui et qui, par ce paiement, revendique la créance contre le débiteur initial. Elle prend la place du créancier et dispose des mêmes droits.
L’action récursoire permet à celui qui a indemnisé un tiers de se retourner contre le véritable responsable, tandis que l’action subrogatoire substitue juridiquement la personne du solvens à celle du créancier originel : le subrogé agit en son nom propre mais dans les droits du créancier. Voir le renvoi vers l’article spécialisé.
Voir mon article sur l'action récursoire : Action récursoire - comprendre et maîtriser le recours de celui qui a réparé le dommage pour autrui
Il organise diverses compensations, mais pour la subrogation, l’article 1346 du Code civil est le texte fondateur à retenir pour tout paiement avec substitution de créancier.
Le recours personnel ouvre droit à une indemnisation plus large (frais, intérêts moratoires, D&I), alors que le recours subrogatoire est limité à la somme payée et aux accessoires de la créance. Les deux peuvent se cumuler dans un même dossier de cautionnement.
Le subrogé bénéficie de la totalité des droits liés à la créance (sûretés, privilèges, actions judiciaires) mais ne peut excéder le droit originairement reconnu au créancier initial.
Oui, toutes les sûretés attachées à la créance (hypothèques, nantissements, privilèges) suivent le sort de la créance par l’effet de la subrogation dans la limite de la somme payée et des éventuelles exceptions légalement prévues.
Clause de subrogation à insérer dans un contrat :
« En cas de paiement effectué par un tiers dans le cadre du présent contrat, le créancier subroge expressément le payeur, dans ses droits et actions contre le débiteur, conformément à l’article 1346-1 du Code civil. »
Clause d’information du débiteur :
« Le débiteur reconnaît avoir été informé de la subrogation intervenue à la suite du paiement réalisé par [Nom du solvens], et s’engage à régler directement à ce dernier toutes sommes dues au titre du présent contrat. »
L’action subrogatoire est une arme essentielle pour l’avocat en contentieux et en négociation commerciale. Sa maîtrise nécessite une parfaite compréhension :
Toujours bien notifier la subrogation au débiteur, vérifier la validité du paiement et préférer les clauses explicites en matière contractuelle.
Article rédigé par Guillaume Leclerc, avocat en contrats commerciaux et contentieux commerciaux à Paris.