Exécution forcée et saisies, mesures provisoires
23/9/25

Audience de conciliation en saisie des rémunérations​ : la procédure détaillée

Saisie des rémunérations : découvrez le déroulement pratique de l’audience de conciliation, les enjeux pour le débiteur et le créancier, les évolutions après la réforme 2025, et les solutions pour contester ou aménager la procédure

Introduction


La saisie des rémunérations est une procédure emblématique du contentieux civil, permettant à un créancier d’obtenir le paiement de sa créance par des retenues sur le salaire du débiteur. Son cadre a été profondément renouvelé par la réforme de 2025. Au cœur de la procédure : l’audience de conciliation, moment charnière où débiteur et créancier sont invités à dialoguer sous l’égide d’un juge ou, désormais, du commissaire de justice.
Ce guide a vocation à vous offrir une vue complète, rédigée par un praticien, pour que chaque partie comprenne ses droits, ses obligations et les marges de manœuvre à chaque étape.


Qu’est-ce que la saisie des rémunérations ?


Définition et finalités


La saisie des rémunérations permet à un créancier muni d’un titre exécutoire d’obtenir le recouvrement de sa créance par des prélèvements mensuels sur le salaire du débiteur. Cette procédure protège le caractère alimentaire du salaire : seuls certains montants sont saisissables selon un barème légal.


Exemple : un bailleur ayant obtenu un jugement condamnant un locataire à régler des loyers impayés pourra saisir son salaire si les autres procédures sont restées infructueuses.


Qui peut solliciter une saisie sur salaire ?


Peut agir tout créancier disposant d’un titre exécutoire, c’est-à-dire une décision de justice définitive ou un acte notarié constatant une créance certaine, liquide et exigible.


Exemples :
• Bailleur pour loyers impayés
• Banque pour crédit non remboursé
• Ex-conjoint pour pension alimentaire


La réforme 2025 et les nouveaux acteurs de la procédure


La déjudiciarisation après juillet 2025


Depuis le 1er juillet 2025, la procédure de saisie des rémunérations est « déjudiciarisée » : la compétence autrefois dévolue au juge de l’exécution passe entre les mains du commissaire de justice. Cette réforme vise à fluidifier le recouvrement, tout en maintenant un contrôle judiciaire en cas de contestation.


À retenir : désormais, le commissaire de justice devient votre interlocuteur privilégié pour la procédure, de la requête à la gestion mensuelle de la saisie.


Un rôle pour le juge en cas de contestation


Si le débiteur souhaite contester le commandement de payer ou la mesure de saisie (ex: le montant prélevé, la régularité de la procédure), le juge de l’exécution redevient compétent pour trancher. Cela permet de préserver les droits du débiteur, notamment en cas de situation financière difficile ou de litige sur la créance.


L’audience de conciliation dans la saisie des rémunérations


Convocation et organisation pratique


L’audience de conciliation est une étape préalable obligatoire. Les parties – créancier et débiteur – sont convoquées : le débiteur reçoit une lettre recommandée, le créancier ou son représentant (souvent l’huissier) une lettre simple. Le délai minimal entre convocation et audience est de 15 jours pour garantir la préparation.


Concrètement, l’audience se déroule dans un bureau fermé, hors présence du public. Le juge ou le commissaire de justice, le greffier, le débiteur et le créancier (ou leur représentant) sont présents. Le débiteur peut se faire assister ou représenter par un avocat.


Le déroulement de l’audience de conciliation


L’audience vise à favoriser un accord amiable sur les modalités de remboursement de la dette. Le juge propose un échéancier ; les parties négocient le montant des prélèvements, parfois inférieurs à la quotité légale.
• Si un accord est trouvé : le juge dresse un procès-verbal, signé par les parties.
• Si le débiteur ne respecte pas cet accord : la saisie peut être mise en œuvre sans nouvelle audience.
• Si aucun accord ne survient : le juge émet une ordonnance autorisant la saisie des rémunérations.


Encadré pédagogique
À l’audience, il est possible de négocier une suspension ou un étalement des prélèvements, notamment pour obtenir une « bouffée d’oxygène » en cas de difficultés.

Modalités en cas d’absence ou de refus de conciliation


Le débiteur peut être absent ou refuser tout accord. Dans ce cas, la procédure suit son cours : le juge ou le commissaire de justice autorise la saisie de la quotité saisissable. L’employeur est alors notifié et devra procéder à la retenue sur le salaire chaque mois, jusqu’à apurement de la dette.


Le rôle du tribunal et du commissaire de justice


Tribunal compétent


Le tribunal compétent pour une saisie des rémunérations est, sauf exceptions, celui du lieu de résidence du débiteur. Depuis 2025, la gestion de la procédure incombe au commissaire de justice, qui instruit la demande, convoque les parties et notifie l’employeur.


Exemple concret : un salarié vivant à Paris sera convoqué au tribunal d’instance ou au commissaire de justice de Paris.


Obligations de l’employeur


L’employeur doit, à réception de l’acte de saisie, effectuer les retenues et les verser au commissaire de justice. Il informe ce dernier s’il existe d’autres saisies, ou si le contrat du salarié a pris fin.


Calcul de la quotité saisissable


Barème légal


La loi fixe chaque année un barème de la quotité saisissable – soit la part du salaire qui peut être retenue sans menacer les besoins vitaux du débiteur. La fraction non saisissable doit permettre au salarié de subvenir à ses besoins essentiels et à ceux de sa famille.


Exemple de calcul : Pour un salaire net mensuel de 2 000 €, une partie sera saisissable selon le barème en vigueur (disponible sur Service-public.fr).


Cas particuliers : cumul de saisies et pensions


Plusieurs saisies peuvent concourir sur la même rémunération (ex : pension alimentaire, dette civile). L’employeur doit alors prioriser la pension alimentaire, puis répartir le solde entre les créanciers civils.


Comment s’opposer à une saisie sur salaire ?

Voies de contestation


Le débiteur peut :
• Contester la créance devant le juge, en invoquant par exemple la prescription, un paiement déjà effectué ou une erreur sur le montant.
• Demander un étalement ou un aménagement de la saisie, en faisant valoir une situation de surendettement (commission de surendettement, Banque de France).
• Vérifier la régularité de la procédure (demande, convocation régulière, calcul du barème, etc.).

Exemple de clause de contestation :


« Le débiteur pourra saisir le juge de l’exécution par requête motivée en cas de contestation sur la mesure de saisie, conformément aux articles R. 3252-39 et suivants du Code du travail. »


Effets de la contestation


La contestation devant le juge suspend la procédure jusqu’à décision. L’employeur ne pourra verser les sommes tant que le litige n’est pas purgé. Si le juge valide la contestation, la saisie est levée pour tout ou partie du montant.


FAQ : les questions clés sur l’audience de conciliation et la saisie des rémunérations


Qu’est-ce que la convocation en conciliation pour une saisie des rémunérations ?


C’est la convocation adressée au débiteur et au créancier pour participer à une audience visant à établir un accord amiable sur le remboursement de la dette. Elle est envoyée au moins 15 jours avant l’audience, permettant une préparation efficace.


Quel est le tribunal compétent pour la saisie des rémunérations ?


Il s’agit généralement du tribunal d’instance du domicile du débiteur. Depuis la réforme 2025, la gestion de la saisie relève du commissaire de justice, qui instruit la procédure et assure les notifications nécessaires.


Comment se passe une saisie des rémunérations ?


La procédure débute par le dépôt d’une requête, suivie de la convocation à une audience de conciliation. À défaut d’accord ou en cas de non-respect du procès-verbal, la saisie est opérée sur le salaire du débiteur dans les limites fixées par le barème légal.


Comment s’opposer à une saisie sur salaire ?


Il faut :
• Saisir le juge de l’exécution pour toute contestation fondée
• Faire valoir une situation de surendettement si nécessaire
• Vérifier la régularité de la procédure et des montants réclamés.


Bon à savoir : la contestation suspend la saisie jusqu’à la décision du juge.


Cas pratiques et illustrations


Exemple de dossier : salarié en difficulté

Un salarié condamné à rembourser une dette civile se voit convoqué devant le juge. À l’audience, il expose sa situation familiale et obtient un étalement sur trois ans au lieu d’une saisie immédiate sur la quotité maximale.


Illustration jurisprudentielle


La Cour de cassation a rappelé que l’audience de conciliation doit permettre au débiteur d’exposer ses conditions de vie. Le juge doit prendre en compte la situation réelle du débiteur pour adapter, le cas échéant, les modalités de la saisie.


Encadré : réforme de la procédure civile et conciliation préalable


Pour aller plus loin, découvrez l’article dédié à la réforme de la procédure civile et la généralisation de la médiation ou conciliation préalable, disponible ici : www-victorisavocat-com-blog-reformeprocedurecivile


Conclusion


La saisie des rémunérations est une procédure technique, désormais simplifiée par la réforme de 2025. L’audience de conciliation reste un espace déterminant pour négocier, préparer sa défense ou aménager la dette. Le débiteur dispose de droits à chaque étape et peut contester la mesure en cas d’abus ou de difficulté majeure. Les professionnels du contentieux doivent veiller à respecter le nouveau cadre et à informer leurs clients des marges de négociation ou d’opposition.


Article rédigé par Guillaume Leclerc, avocat en contrats commerciaux et contentieux commerciaux à Paris.