Introduction au droit de la concurrence
Le droit de la concurrence vise à garantir le fonctionnement équitable des marchés en sanctionnant les pratiques anticoncurrentielles et déloyales qui nuisent à la liberté de commerce et à l'intérêt des consommateurs. En France, ce droit est régi principalement par les articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce, qui prohibent les ententes et l'abus de position dominante. Sa mise en œuvre est essentiellement jurisprudentielle et évolue selon la pratique des tribunaux.
Pourquoi faire appel à un avocat en droit de la concurrence ?
L'avocat spécialisé assiste les entreprises dans des secteurs variés : distribution, service, industrie ou digital, dès qu'elles sont confrontées à un enjeu de conformité, à un contentieux, ou à la gestion d'une opération stratégique comme une fusion ou une acquisition. Son rôle : éviter les pratiques risquées, anticiper les sanctions, ou défendre l'entreprise devant les autorités de la concurrence nationales et européennes.
Exemple concret
Une PME qui élabore un accord de distribution exclusive sollicite un avocat pour vérifier que la clause d'exclusivité ne contrevient pas au principe de libre concurrence. L'avocat analyse les parts de marché, l'existence de barrières à l'entrée et la durée de la clause pour en garantir la conformité.
Les missions principales de l’avocat en droit de la concurrence
Conseil stratégique et conformité
- Analyse des pratiques commerciales : politique de prix, accords de distribution, partenariats stratégiques.
- Audit de conformité, formation des équipes, rédaction de chartes internes.
- Élaboration de contrats : clauses de non-concurrence, exclusivité, sélectivité.
Encadré pratique : Exemple de clause de non-concurrence
« Pendant une durée de 12 mois suivant la cessation du présent contrat, le partenaire s’interdit d’exercer une activité concurrente sur le marché des [secteur précisé] dans la zone géographique couverte par le Contrat. »
Contentieux des pratiques anticoncurrentielles
Défense des entreprises accusées de :
- Ententes illicites (cartels visant à fixer des prix ou se répartir des marchés)
- Abus de position dominante (pression excessive sur concurrents ou clients)
- Obstruction à l’accès au marché (refus de vente discriminatoire)
Jurisprudence illustrative
Sanction de France Télécom (Conseil de la concurrence, déc. 04-D-18) pour « ciseau tarifaire » : un opérateur dominant proposait des tarifs empêchant ses concurrents d’obtenir une marge suffisante, condamné à 40 millions d’euros d’amende.
Les types de pratiques de la concurrence déloyale
Les quatre grandes pratiques déloyales
- Imitation : usage de signes distinctifs créant une confusion, comme le logo ou la dénomination sociale.
- Parasitisme : profiter de la notoriété ou des efforts d’un concurrent sans contrepartie équitable.
- Dénigrement : critiques publiques visant la réputation ou les produits d’un concurrent.
- Désorganisation : débauchage massif de salariés, divulgation de secrets d’entreprise.
Preuve et sanctions des actes déloyaux
- Modes de preuve : constat d’huissier, saisie de documents, témoignages.
- Sanctions : dommages-intérêts, cessation des actes sous astreinte, publication de la décision, destruction de matériel illicite.
Exemple pratique
Un groupe industriel dénonce la désorganisation orchestrée par un concurrent qui a recruté ses principaux responsables techniques. Le constat d’huissier établit la preuve, la justice ordonne la cessation et accorde une réparation financière.
Les trois types d’avocats en France
Avocat en contentieux
Intervient en cas de litige devant les tribunaux pour défendre ou attaquer, avec une spécialisation en procédure et en stratégie judiciaire.
Avocat en conseil
Accompagne les entreprises hors contentieux, veille à la conformité, oriente la rédaction de contrats, anticipe les risques.
Avocat en arbitrage ou mandataire
Gère les résolutions de litiges par la négociation, l’arbitrage ou la médiation, hors du champ judiciaire classique.
Les opérations de fusion et d’acquisition : rôle de l’avocat en concurrence
L’avocat intervient pour :
- Vérifier que l’opération ne porte pas atteinte à la libre concurrence sur les marchés concernés.
- Monter le dossier d’autorisation auprès de l’Autorité de la concurrence ou de la Commission européenne.
- Mettre en place des engagements correctifs (cession d’activités, garantie de maintien du niveau de concurrence).
Exemple de pratique décisionnelle
Lors d’une fusion entre deux groupes de distribution, l’Autorité de la concurrence exige la cession de certains magasins pour éviter la domination locale d’une seule enseigne et préserver l’offre aux consommateurs.
Les principales règles de concurrence en droit français et droit de l'Union européenne
Le droit de la concurrence repose sur le principe de libre concurrence : chaque acteur du marché doit pouvoir exercer son activité sans entrave, dans le respect d’un cadre transparent et loyal. Cette exigence prévaut tant au niveau national qu’européen, avec pour objectif la stimulation de l’innovation, l’amélioration de la qualité des produits et services et la garantie de prix compétitifs pour le consommateur.
Les fondements essentiels du droit de la concurrence
Dispositions majeures
- Articles L. 420-1 et L. 420-2 du Code de commerce : interdiction des accords ou pratiques concertées et de l’abus de position dominante.
- Article L. 410-1 : application aux activités de production, distribution et services.
- Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) : principes applicables en cas de pratiques affectant plusieurs États membres.
Particularités d'application
- La qualité de l’auteur des pratiques importe peu, public ou privé, du moment qu'une activité économique est exercée.
- Les sanctions sont modulées selon l’impact sur le marché, la persistance des infractions et le bénéfice tiré.
Les interdictions majeures : ententes et abus de position dominante
- Ententes anticoncurrentielles : il est interdit pour des entreprises de s’accorder secrètement afin de fixer les prix, de se répartir les marchés ou de limiter la production. Ces pratiques faussent la concurrence et sont sanctionnées en vertu de l’article L. 420-1 du Code de commerce (France) et l’article 101 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (UE).
- Abus de position dominante : une entreprise détenant un pouvoir significatif sur un marché ne peut l’exploiter pour évincer ou affaiblir ses concurrents, par exemple via des prix prédateurs ou des pratiques discriminatoires.
Le contrôle des opérations de concentration
La loi surveille les fusions, acquisitions et création de coentreprises (joint-ventures) pour éviter qu’un acteur ne concentre une part excessive du marché, risquant ainsi de limiter la concurrence et les alternatives pour les consommateurs. En France, c’est l’Autorité de la concurrence qui examine ces opérations dès lors que les seuils de chiffre d’affaires sont atteints ; au niveau européen, c’est la Commission européenne qui intervient pour les grandes opérations transfrontalières.
Le contrôle des aides d’État
Les règles européennes interdisent généralement les aides accordées par les États aux entreprises, quand celles-ci viennent fausser le jeu de la concurrence. Certaines dérogations existent, notamment pour soutenir des secteurs stratégiques ou en période de crise économique, sous contrôle strict de la Commission européenne.
Les autorités compétentes
Le respect des règles de la concurrence est assuré par :
- La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), qui veille à la régulation concurrentielle des marchés et à la protection des consommateurs en France.
- L’Autorité de la concurrence, entité indépendante chargée de la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles et du contrôle des concentrations.
- La Commission européenne, garante de la politique de concurrence dans l’UE et pilote du réseau européen de concurrence.
Les seuils d’application des règles de concurrence : chiffres clés
Les opérations de concentration ne sont soumises à l’examen et à l’autorisation de l’Autorité de la concurrence que si certains seuils chiffrés sont franchis. Ces seuils sont régulièrement réévalués pour suivre l’évolution du marché.
Principaux seuils applicables en France (hors commerce de détail ):
- Le chiffre d’affaires total mondial hors taxes de l’ensemble des entreprises ou groupes parties à la concentration doit être supérieur à 250 millions d’euros (nouveau seuil depuis le projet de loi de mai 2024 ; précédemment 150 millions d’euros).
- Le chiffre d’affaires total hors taxes réalisé en France par au moins deux des entreprises ou groupes concernés doit excéder 80 millions d’euros (ancien seuil : 50 millions d’euros).
Secteur du commerce de détail : seuils spécifiques
- Chiffre d’affaires total mondial hors taxes : seuil abaissé à 100 millions d’euros (au lieu de 75 millions d’euros auparavant).
- Chiffre d’affaires réalisé en France dans le secteur du commerce de détail par au moins deux entreprises parties : seuil relevé à 20 millions d’euros (au lieu de 15 millions d’euros).
- Dans les départements et collectivités d'outre-mer, le seuil individuel est encore plus faible, fixé à 5 millions d’euros.
En droit européen :
- La Commission européenne est compétente lorsque le chiffre d’affaires total mondial des parties dépasse 5 milliards d’euros et que le chiffre d’affaires réalisé dans l’UE par au moins deux parties dépasse 250 millions d’euros (règlement n° 139/2004).
- Plusieurs mécanismes permettent à la Commission d’examiner des opérations qui n’atteignent pas ces seuils mais qui présentent un risque identifié pour la concurrence (option de « renvoi » par les États membres, article 22 du règlement européen).
Attention pratique :
Certaines opérations en dessous des seuils peuvent tout de même être examinées si elles posent un risque de distorsion notable de la concurrence, notamment dans des secteurs sensibles ou à fort enjeu d’innovation.
Cas pratiques et enjeux digitaux
Exemples de litiges numériques
- Concurrence déloyale dans le référencement internet (SEO négatif, captation de trafic illicitement)
- Pratiques de « scraping » abusives nuisant à la visibilité du concurrent
- Utilisation de marques dans les adwords pour détourner la clientèle
Encadré pédagogique
Il est dorénavant courant qu’une société digitale se plaigne d’une perte de chiffre liée à la duplication de ses contenus par un concurrent. L’intervention rapide de l’avocat en concurrence permet d’obtenir le retrait des contenus et une indemnisation.
FAQ sur le droit de la concurrence et l’avocat spécialisé
Qu’est-ce qu’un avocat en droit de la concurrence ?
C’est un professionnel formé à l’analyse des normes nationales et européennes relatives à la concurrence, intervenant à la fois en conseil et en contentieux pour préserver la liberté de commerce, conseiller sur les risques et défendre devant l’Autorité de la concurrence. Son expertise couvre la distribution, l’industrie, la technologie, et les opérations internationales.
Quels sont les 3 types d'avocat ?
- Contentieux : spécialiste du litige.
- Conseil : consultant et rédacteur de contrats.
- Arbitrage/mandataire : expert en solutions amiables.
Quelles sont les 4 pratiques principales de la concurrence déloyale ?
- Imitation : confusion sur les signes distinctifs.
- Parasitisme : captation indue d’efforts d’autrui.
- Dénigrement : critiques publiques ciblées.
- Désorganisation : recrutement abusif ou vol de secrets.
Quel est le cadre légal de la clause de non-concurrence ?
La clause de non-concurrence est valable si elle est limitée dans le temps, l’espace, et proportionnée aux intérêts protégés : elle ne doit pas empêcher de travailler. Exemple concret de rédaction : voir ci-dessus.
Quelle procédure pour prouver la concurrence déloyale ?
La preuve se prépare par constat d’huissier, collecte documentaire, témoignages et, si besoin, saisies ordonnées par le juge (article 145 du code de procédure civile). Les dommages-intérêts et les mesures accessoires (cessation, publication, astreinte) sont les principales sanctions.
Conseils pratiques pour anticiper les risques en concurrence
- Procéder à des audits réguliers des pratiques commerciales
- Mener des formations internes sur la conformité
- Rédiger des clauses claires de non-concurrence
- Suivre les actualités et les décisions des autorités de la concurrence
Conclusion
L’avocat en droit de la concurrence est un partenaire clé pour chaque entreprise évoluant sur des secteurs disputés et innovants. Son expertise technique et stratégique fait la différence dans la prévention, la gestion et le règlement des conflits concurrenciels.
Article rédigé par Guillaume Leclerc, avocat en contrats commerciaux et contentieux commerciaux à Paris.