Contrats commerciaux
9/10/25

Le pacte de préférence : Définition, régime et enjeux pratiques

Le pacte de préférence, outil contractuel incontournable du droit français, est souvent utilisé dans les ventes immobilières, les cessions de droits sociaux ou les relations commerciales. Cet article complet et pédagogique décrypte son régime, sa distinction avec la promesse unilatérale, ses enjeux pratiques, ainsi que toutes vos questions fréquemment posées, illustrées d’exemples concrets rédigés par un avocat spécialiste.

Sommaire de l’article

  • Qu’est-ce qu’un pacte de préférence ?
  • Quels sont les cas d’usage et exemples concrets ?
  • Régime juridico-contractuel : conditions, durée et conséquences
  • Différences avec la promesse unilatérale de vente
  • La purge du pacte de préférence : modalités et enjeux
  • Le droit de préférence : fonctionnement et articulation
  • Action interrogatoire du pacte de préférence
  • Sur la promesse de vente et le pacte de préférence : comparaison
  • Points de droit annexes et articles clés du Code civil
  • FAQ : toutes vos questions sur le pacte de préférence
  • Importance de l’accompagnement d’un avocat

Qu’est-ce qu’un pacte de préférence ?

Le pacte de préférence est un avant-contrat par lequel une personne (le "promettant") s’engage à proposer en priorité à une autre (le "bénéficiaire") de traiter avec elle si jamais elle décide de contracter à l’avenir sur un bien ou un droit déterminé. Autrement dit, le promettant accorde au bénéficiaire la priorité pour conclure ce contrat futur, mais sans s’engager d’avance à le conclure.

Référence légale : Article 1123 du Code civil

Art. 1123 – "Le pacte de préférence est le contrat par lequel une partie s’engage à proposer prioritairement à son bénéficiaire de traiter avec lui pour le cas où elle déciderait de contracter."

Ce mécanisme protège le bénéficiaire contre le risque de voir le bien « échapper » à sa priorité; à la différence d’une promesse unilatérale, il ne peut forcer la vente.

Cas d’usage et exemples concrets

Les pactes de préférence sont couramment utilisés dans diverses situations, par exemple :

  • Lorsqu’un propriétaire commercial veut offrir la priorité d’achat à son locataire si jamais il décide de vendre le local.
  • Entre copropriétaires pour éviter l’arrivée d’un tiers indésirable au sein d’une famille ou d’une société.
  • Dans les sociétés, entre actionnaires ou associés, pour garantir un droit de priorité en cas de cession d’actions ou de parts sociales (clause de pacte d’actionnaires).
  • Pour préserver un patrimoine familial, par exemple lorsque l’on souhaite qu’un bien reste dans la famille.

Exemple de clause de pacte de préférence :

"En cas de volonté de céder tout ou partie des actions détenues, le cédant s’engage à notifier sa décision au bénéficiaire qui disposera d’un délai de 30 jours pour manifester son intention d’acquérir lesdites actions aux conditions prévues."

Régime juridico-contractuel : conditions, durée et conséquences

Conditions de validité

  • Accord des volontés : comme pour tout contrat, la rencontre de deux volontés est nécessaire.
  • Objet clair : bien ou droits concernés doivent être identifiés.
  • Durée : le pacte peut être à durée déterminée ou indéterminée.
  • Pas d’exigence de prix à l’avance, sauf exception : la prédétermination du prix n’est pas obligatoire.

Effets pour les parties

  • Le promettant a l’obligation, le jour où il décide de conclure un contrat de céder (ou vendre) le bien ou le droit concerné, de proposer en priorité au bénéficiaire.
  • Le bénéficiaire est totalement libre d’accepter ou de refuser : il n’y a pour lui aucune obligation de contracter.

Attention :

  • Si le promettant ne respecte pas la préférence, le bénéficiaire peut demander des dommages et intérêts, voire sous conditions, sa substitution au contrat conclu avec un tiers.
  • La jurisprudence distingue entre la faute simple et la complicité du tiers pour la sanction applicable.

Caducité ou renouvellement

  • Le pacte peut devenir caduc s’il n’est pas expressément reconduit lors du renouvellement d’un contrat principal (ex : bail).

Différence entre la promesse unilatérale et le pacte de préférence

Promesse unilatérale

  • Le promettant donne déjà son consentement au contrat futur ; le bénéficiaire dispose d’une « option » qui, lorsqu’elle est levée, forme le contrat définitif.

Pacte de préférence

  • Le promettant consent uniquement à la priorité, pas au contrat lui-même.
  • Le contrat n’existera que si le promettant décide de contracter et que le bénéficiaire accepte la proposition ; il s’agit donc d’un droit de priorité et non d’un droit d’option.

Exemple illustratif :

  • Promesse unilatérale : "Si tu acceptes, je m’engage dès maintenant à vendre mon appartement au prix de 200 000 €."
  • Pacte de préférence : "Si je décide un jour de vendre mon appartement, je m’engage à te le proposer avant de l’offrir à tout autre acquéreur."

La purge du pacte de préférence : modalités et enjeux

La "purge" consiste à informer officiellement le bénéficiaire du pacte de préférence, afin qu’il puisse faire valoir ou non son droit de priorité.

Comment purger un pacte de préférence ?

  • Le promettant notifie sa volonté de contracter au bénéficiaire (souvent par lettre recommandée ou acte d’huissier).
  • Le bénéficiaire dispose d’un délai (souvent précisé dans la clause ou laissé à l’appréciation raisonnable) pour manifester son choix.
  • Passé ce délai ou en cas de refus, le promettant peut contracter avec un tiers.

Exemple pratique :
Dans le cadre d’une vente immobilière, un notaire notifie au bénéficiaire du pacte la décision de vendre, précisant les conditions et le délai pour répondre. Si le bénéficiaire renonce ou laisse passer le délai, le bien peut être vendu à un tiers

Fonctionnement du droit de préférence et articulation avec d’autres mécanismes

  • Le droit de préférence s’applique avant toute offre à un tiers.
  • Le bénéficiaire ne dispose pas d’un droit de préemption légal, mais d’une priorité conventionnelle.
  • Les relations entre pacte de préférence et droits de préemption légaux doivent être envisagées au cas par cas.

Action interrogatoire pacte de préférence

L’action interrogatoire est une innovation permise par l’article 1123 du Code civil suite à la réforme de 2016.

Définition et mécanisme

  • Un tiers qui soupçonne l’existence d’un pacte de préférence peut demander par écrit au bénéficiaire de confirmer s’il entend l’invoquer dans un délai raisonnable.
  • En l’absence de réponse, le bénéficiaire ne pourra pas ultérieurement obtenir la substitution ou la nullité du contrat conclu avec le tiers.
  • Ce mécanisme renforce la sécurité juridique pour le tiers acquéreur.

Exemple d’application :
Un investisseur souhaite acheter un bien susceptible d’être grevé d’un pacte de préférence. Il écrit au bénéficiaire possible et, sans réponse, acquiert en toute sécurité, hors mauvaise foi démontrée

Différence entre une promesse de vente et un pacte de préférence

  • Promesse de vente : le bien est réservé, la vente peut être forcée si le bénéficiaire lève l’option.
  • Pacte de préférence : seul un droit de priorité, pas d’obligation définitive.

Points de droit annexes et articles clés du Code civil

  • Article 1123 : définition légale du pacte de préférence.
  • Article 1124 : sur la promesse unilatérale de contrat.
  • Article 1128 : conditions de validité du contrat (capacité, consentement, contenu licite).
  • Article 1165 : prix dans les contrats de prestation de service.
  • Article 1589 : promesse de vente vaut vente si accord sur la chose et le prix.
  • Articles 1210, 1223 : sur la prohibition des engagements perpétuels et la réduction du prix.
  • Article 34 : dispositions générales sur l’état civil (hors sujet pour le pacte de préférence mû proprement).
  • Article 1112-1 : devoir d’information et négociation précontractuelle.

Qu’est-ce que le pacte d’actionnaires et son utilité ?

Le pacte d’actionnaires est une convention entre les associés d’une société complémentaire aux statuts, visant à organiser les cessions de titres, l’exercice des droits de vote ou la gestion des conflits.

Il permet notamment de prévoir des pactes de préférence pour garantir la stabilité du groupe d’actionnaires et anticiper les situations conflictuelles ou les entrées/sorties d’associés.

Exemple de clause de pacte d’actionnaires

"Tout associé souhaitant céder ses actions devra en informer les autres associés, qui bénéficieront d’un droit de préférence pour l’acquisition, dans les conditions et délais prévus au présent pacte."

Foire aux questions (FAQ) : toutes vos questions sur le pacte de préférence

Qu’est-ce qu’un pacte de préférence ?

Le pacte de préférence est un contrat par lequel une partie promet de réserver la priorité à un bénéficiaire pour contracter, dans l’hypothèse où elle déciderait de vendre ou transférer un bien ou un droit.

Quelle est la différence entre promesse unilatérale et pacte de préférence ?

La promesse unilatérale engage le promettant à l’avance ; son consentement est entier et la vente est acquise si le bénéficiaire lève l’option. Le pacte de préférence ne donne qu’un droit prioritaire ; la vente n’existera que si le promettant décide d’y procéder ET si le bénéficiaire accepte l’offre.

Qu’est-ce que la purge d’un pacte de préférence ?

La purge consiste à notifier au bénéficiaire l’intention de conclure afin qu’il puisse exercer ou non son droit de préférence. Elle assure la sécurité juridique de la transaction, notamment en matière immobilière.

Comment fonctionne le droit de préférence ?

Le bénéficiaire a simplement la priorité pour contracter, mais n’est jamais obligé d’acheter. Le promettant ne peut vendre à un tiers sans l’avoir d’abord proposé au bénéficiaire.

Action interrogatoire : en quoi consiste-t-elle ?

L’action interrogatoire engage le bénéficiaire à se prononcer dans un délai défini sur sa volonté d’utiliser la préférence. Cela protège les tiers contre des risques d’annulation ou de substitution ultérieurement à la vente.

Promesse de vente et pacte de préférence : quelles différences ?

Dans la promesse de vente, la vente devient obligatoire pour le promettant si le bénéficiaire lève l’option. Le pacte de préférence laisse toute liberté au promettant de ne pas vendre.

Quel est l’article 34 du code civil ?

Article relatif aux actes d’état civil (hors champ direct du pacte de préférence).

Quel est le but d’un pacte d’actionnaires ?

Garantir la stabilité capitalistique et l’organisation des relations entre actionnaires, dans la confidentialité et avec souplesse, grâce notamment à des droits de priorité convenus.

Quel est le nouvel article 1165 du code civil ?

L’article 1165 encadre la fixation du prix dans les contrats de prestation de services.

Que prévoit l’article 1589 du Code civil ?

La promesse de vente vaut vente s’il y a accord sur la chose et le prix.

Et l’article 1124 du Code civil ?

Définit la promesse unilatérale de contrat.

L’article 1223 du Code civil ?

Droit à la réduction du prix en cas d’inexécution partielle.

L’article 1112-1 Code civil ?

Obligation précontractuelle d’information.

Encadré pédagogique : la réglementation et l’accompagnement par un avocat

Le domaine du pacte de préférence est réglementé et complexe en raison de ses enjeux juridiques et financiers parfois considérables. La rédaction, l’interprétation ou la contestation d’une telle clause méritent l’avis d’un avocat expérimenté, seul à même d’anticiper les pièges, de sécuriser la transaction et d’assurer la meilleure protection des intérêts des parties.

Conclusion

Le pacte de préférence est un outil souple mais exigeant. Sa bonne rédaction et sa purge efficace sont essentielles, tant dans la vie des affaires, l’immobilier, que les relations de société. Grâce à des exemples concrets, des rappels des textes légaux et la comparaison avec les promesses unilatérales, vous disposez désormais d’une vue d’ensemble pour comprendre ce mécanisme et éviter ses écueils.

Article rédigé par Guillaume Leclerc, avocat en contrats commerciaux et contentieux commerciaux à Paris.