Découvrez les obligations du locataire dans un bail commercial : paiement du loyer, entretien, respect de la destination des lieux, travaux à charge, et conséquences en cas de manquement. Un guide complet à destination des dirigeants de PME, rédigé par un avocat en droit commercial à Paris.
En matière de bail commercial, les obligations du locataire sont au cœur du bon équilibre contractuel entre le bailleur et le preneur. Pour les dirigeants de PME, comprendre ces obligations est essentiel afin d’éviter des litiges coûteux et d’assurer la pérennité de leur activité. Le bail commercial n’est pas un simple contrat de location : il constitue un véritable outil de gestion du patrimoine professionnel, dont la maîtrise suppose une connaissance précise du droit applicable et de la jurisprudence récente.
Réglementé par les articles L.145-1 et suivants du Code de commerce, le bail commercial est conclu pour une durée minimale de neuf ans, généralement assortie d’une faculté de résiliation tous les trois ans (d’où son appellation de bail « 3-6-9 »).
Il confère au locataire le droit au renouvellement du bail ou, en cas de refus, une indemnité d’éviction. Ce statut protecteur justifie la rigueur des obligations qui pèsent sur le preneur, en contrepartie d’une stabilité juridique avantageuse.
Les obligations du locataire traduisent la logique d’équilibre du contrat : à la jouissance paisible des lieux garantie par le bailleur répondent des devoirs précis du locataire, notamment l’entretien des locaux et le respect des clauses contractuelles.
L’obligation première du locataire est celle du paiement du loyer aux échéances convenues dans le bail. Ce paiement peut être mensuel ou trimestriel selon les stipulations contractuelles. En 2025, le projet de loi de simplification prévoit d’ailleurs que le paiement mensuel du loyer sera de droit pour les locaux commerciaux.
Exemple pratique : Un commerçant n’ayant pas réglé deux mensualités consécutives peut voir son bail résilié par voie judiciaire ou de clause résolutoire, si celle-ci est prévue au contrat.
Le bail peut mettre à la charge du preneur certaines charges récupérables : taxes, entretien courant, consommation énergétique, etc. Depuis la loi Pinel de 2014, un inventaire précis des charges, impôts et taxes doit être annexé au bail (article R.145-35 du Code de commerce). Le bailleur ne peut plus transférer au locataire les grosses réparations mentionnées à l’article 606 du Code civil.
Le locataire doit utiliser les locaux conformément à la destination prévue dans le bail. Cette destination résulte d’une clause essentielle, souvent liée à un type d’activité autorisée (commerce de prêt-à-porter, restauration, bureau, etc.).
Exemple concret : Un restaurant qui transformerait son local en salon de coiffure sans autorisation violerait la clause de destination et s’exposerait à la résiliation du bail pour manquement grave.
Toute modification d’activité nécessite l’accord exprès du bailleur ou l’engagement d’une procédure de déspécialisation partielle ou plénière, prévue par les articles L.145-47 et suivants du Code de commerce.
Le locataire doit assurer l’entretien courant des locaux et effectuer les réparations locatives, c’est-à-dire celles de faible importance, liées à l’usage des lieux (peinture, menuiserie intérieure, plomberie légère). Il doit rendre les locaux en bon état, conformément à l’état des lieux d’entrée.
Exemple de clause : « Le preneur s’engage à entretenir les lieux loués en bon état d’entretien courant et à exécuter les réparations locatives définies à l’article 1754 du Code civil. »
Les réparations importantes (fondations, murs porteurs, toiture, gros œuvre) relèvent de l’article 606 du Code civil et incombent au bailleur. La jurisprudence (Cass. civ. 3e, 10 avril 2025, n°23-14.974) a récemment confirmé que toute clause exonérant le bailleur de son obligation de délivrance ou d’entretien majeur est nulle.
Le locataire doit user raisonnablement des lieux, c’est-à-dire dans le respect de leur destination, tout en prenant soin d’éviter toute dégradation ou usage abusif. En pratique, cette obligation impose de :
Un usage fautif peut justifier la résiliation du bail, sans préavis, si le manquement compromet la destination des lieux.
À la fin du bail, le locataire doit restituer le local dans le même état que celui constaté à l’entrée, sauf dégradations dues à la vétusté ou à la force majeure. Ce principe a été réaffirmé par la jurisprudence récente. Le procès-verbal d’état des lieux de sortie est donc un document essentiel pour prévenir tout litige.
Conseil pratique : En cas de doute sur la nature de certains travaux, la médiation ou un accord amiable consigné par écrit permet souvent d’éviter des procédures contentieuses coûteuses.
Le preneur peut réaliser des travaux d’embellissement ou d’aménagement, sous réserve de ne pas altérer la structure du bâtiment. Ces travaux sont à sa charge, sauf accord contraire.
Exemple : repeindre les murs, changer la moquette, moderniser la vitrine sont des travaux locatifs légitimes.
En revanche, la création d’une mezzanine ou la modification des réseaux porteurs nécessitent l’autorisation écrite du bailleur.
Si des travaux sont imposés par les autorités (mise aux normes électriques ou sécurité incendie), ils relèvent généralement de la responsabilité du bailleur, sauf clause expresse contraire. Toutefois, depuis la loi Pinel, certaines clauses transférant de tels travaux au locataire peuvent être jugées abusives et réputées non écrites.
La plupart des baux commerciaux comportent une clause résolutoire stipulant la résiliation automatique en cas de non-paiement du loyer ou de non-respect des obligations contractuelles. Toutefois, cette clause ne produit effet qu’un mois après une mise en demeure restée sans effet (article L.145-41 du Code de commerce).
Le bailleur peut demander des dommages et intérêts compensatoires en cas de perte subie (ex. : remise en état du local, manque à gagner en cas de relocation différée). La gravité du manquement et son impact économique sont appréciés souverainement par les juges.
Un manquement grave (non-paiement, usage abusif, sous-location non autorisée) peut priver le locataire de son droit au renouvellement du bail et de son indemnité d’éviction.
Le bailleur doit délivrer un local conforme à sa destination et en bon état d’usage. Cette obligation comprend une délivrance matérielle (remise des clés, accessibilité effective) et une délivrance juridique (autorisation d’exploiter, conformité réglementaire).
La Cour de cassation a rappelé en avril 2025 qu’une clause de non-recours du locataire ne peut exonérer le bailleur de cette obligation essentielle.
Conformément aux articles 605 et 606 du Code civil, le bailleur doit supporter les grosses réparations touchant à la structure, la toiture ou les fondations, sauf stipulation expresse contraire (non applicable depuis la loi Pinel, ces clauses sont désormais réputées non écrites si elles contredisent l’ordre public des baux commerciaux).
Le bailleur doit garantir au locataire :
Lors de la signature ou du renouvellement du bail, le bailleur doit remettre au locataire plusieurs diagnostics techniques obligatoires :
L’absence de remise de ces documents peut engager la responsabilité du bailleur et affecter la validité du bail.
Le locataire doit payer le loyer, entretenir les locaux, respecter la destination des lieux et restituer les locaux en bon état. Il doit également se conformer aux normes légales applicables à son activité.
Outre le paiement des loyers et charges, vous devez user raisonnablement du local, prévenir le bailleur des dégradations, et effectuer l’entretien courant. Le non-respect de ces obligations peut justifier la résiliation du bail.
Le bailleur doit délivrer un local conforme, réaliser les grosses réparations, garantir la jouissance paisible et assurer la conformité légale et technique du bien.
Les travaux d’entretien courant et d’embellissement sont à la charge du locataire. Les grosses réparations structurelles incombent au bailleur.
Le bailleur peut activer la clause résolutoire, demander des dommages et intérêts, ou s’opposer au renouvellement du bail.
Oui. Conformément à l’article 1720 du Code civil et à la jurisprudence, les travaux de sécurité électrique relèvent de la responsabilité du bailleur.
À la fin du bail, les travaux réalisés par le locataire (hors clause contraire) deviennent la propriété du bailleur sans indemnisation, sauf si le bail prévoit la possibilité de remise en l’état.
Le bail commercial constitue une base juridique essentielle à toute activité commerciale. Le locataire y trouve une stabilité, mais également des responsabilités lourdes : veiller à l’entretien, respecter le cadre d’usage et faire preuve de diligence. La clarté du bail et la rigueur dans sa gestion quotidienne sont les meilleures garanties d’une relation sereine avec le bailleur.
Matière réglementée : Le régime des baux commerciaux relève d’une matière encadrée par la loi et la jurisprudence. Il est donc fortement conseillé de solliciter les conseils d’un avocat afin d’anticiper les risques, adapter les clauses à votre activité, et sécuriser vos relations contractuelles.