Contrats immobiliers commerciaux
29/9/25

Révision du loyer en bail commercial : le guide pratique et expert

Découvrez tout sur la révision du loyer en bail commercial : mécanismes légaux, exemples pratiques, indices à utiliser (ILC, ILAT), modèles de clauses, jurisprudence récente et réponses à toutes les questions fréquentes. Un guide expert par un avocat à Paris, clair, exhaustif et concret.

Révision du loyer en bail commercial : guide exhaustif et analyse d’avocat


Fondements et mécanismes de la révision


Qu’est-ce que la révision du loyer ?


La révision du loyer est l’ajustement du montant du loyer d’un local commercial, soit par application de la loi, soit sur la base de clauses contractuelles. Son objectif : garantir un équilibre entre intérêts du bailleur et du locataire, en tenant compte des évolutions économiques et de la valeur réelle du bien.


Cadre légal et articles de référence


Les principaux articles du Code de commerce encadrant la révision sont :
• L145-33 à L145-39 : détermination de la valeur locative, conditions de la révision triennale, règles de plafonnement et de déplafonnement.
• L145-38 : la révision triennale est admise tous les 3 ans, à la demande du bailleur ou du locataire.
• L145-39 : ouverture aux clauses d’échelle mobile ou d’indexation contractuelle.


Principes clés : valeur locative et équilibre contractuel


La valeur locative est déterminée par :
• Les caractéristiques du local (surface, agencement, état…)
• La destination contractuelle (usage magasin, restaurant, bureau…)
• Les obligations des parties (charges, travaux…)
• Les facteurs locaux de commercialité (attractivité, flux, concurrence…)
• Les prix pratiqués à proximité pour des locaux similaires
L’application rigoureuse de ces paramètres protège contre les abus et crée des repères fiables pour toute négociation ou contentieux.


Les différents types de révision du loyer


Révision triennale légale


La révision triennale (tous les 3 ans minimum) doit être formellement demandée et n’est jamais automatique :
• Demande par LRAR ou acte d’huissier
• Calcul sur la base de l’indice ILC ou ILAT indiqué au contrat
• Prise d’effet à la date de la demande, sans rétroactivité
• Délai de prescription : deux ans à compter de la demande


Exemple :

Un loyer fixé en 2021 à 24 000 €, indexé sur un ILC passant de 115,63 à 130,80 :


Nouveau loyer = 24 000 € × (130,80 / 115,63) ≈ 27 154 €


Clause d’indexation (ou échelle mobile)


La clause prévoit une adaptation automatique du loyer selon l’évolution d’un indice choisi, souvent chaque année.
• Indices fréquents : ILC pour commerce, ILAT pour tertiaire
• Attention : la clause doit permettre la hausse ET la baisse. Une clause unilatérale est réputée non écrite (jurisprudence Cour de cassation 2025)


Exemple de clause conforme :


« Le loyer sera automatiquement révisé le 1er janvier de chaque année selon la variation de l’indice ILC publié par l’INSEE, indice de référence : 1er trimestre 2021. »


Révision exceptionnelle et déplafonnement


Le loyer peut dépasser le plafond légal dans deux principaux cas :
• Modification substantielle des facteurs locaux de commercialité (ex : ouverture d’un centre commercial, grand projet urbain)
• Bail d’une durée supérieure à 9 ans


Exemple jurisprudentiel :


La survenance d’un nouvel aménagement majeur, ayant eu un impact positif sur la zone commerçante, a permis au bailleur d’obtenir le déplafonnement du loyer et une augmentation supérieure à l’indice ILC.


Les indices de révision du loyer commercial


Indice des Loyers Commerciaux (ILC)

• Spécifique aux locaux commerciaux, publié trimestriellement par l’INSEE.
• Il intègre la consommation des ménages, le coût de la construction et le chiffre d’affaires du commerce de détail.
• Appliqué dans la plupart des baux conclus ou renouvelés depuis 2008.


Modèle de calcul :


Nouveau loyer = Loyer actuel × (Indice actuel / Indice de référence)

Indice des Loyers des Activités Tertiaires (ILAT)


• Utilisé pour les bureaux, entrepôts, locaux d’activités tertiaires
• Indexé différemment de l’ILC, plus adapté aux activités de conseil, agences, services


Procédure de révision : démarches, étapes, alertes


Comment demander la révision du loyer ?


• Notification par lettre recommandée avec AR ou acte extrajudiciaire
• Mention obligatoire du montant proposé ou demandé
• Respect du délai minimum de 3 ans depuis la dernière fixation
• La révision prend effet seulement à compter de la demande


Exemple de courrier de demande de révision :


« Madame, Monsieur, Conformément à l’article L145-38 du Code de commerce, je sollicite la révision du loyer du local situé adresse. En application de la variation de l’ILC depuis la dernière fixation, je propose le nouveau montant de loyer révisé. »


En cas de désaccord : recours au juge


Si le locataire conteste la demande ou le montant :
• Saisine du juge des loyers commerciaux dans les deux ans
• Expertise éventuelle sur la valeur locative réelle
• Application de la décision judiciaire à compter de la demande initiale

Clauses sensibles et nullité


• Les clauses prévoyant une indexation unilatérale ou sur un indice illicite sont annulées
• L’ICC, souvent rencontré dans les vieux baux, ne peut plus être appliqué (jurisprudence 2025)
• L’augmentation annuelle ne peut excéder 10 % par rapport à l’année précédente


Cas pratiques et illustrations


Exemples concrets de révision réussie


• Un commerçant sollicite la baisse du loyer suite à la fermeture d’un marché à proximité, appuyé par une étude d’expert sur la valeur locative : le juge adapte la révision à la réalité du marché
• Une enseigne franchisée obtient la stabilité du loyer grâce à une clause d’indexation sur l’ILC, neutre et transparente


Jurisprudences marquantes


• Cass. civ. 3 e, 23 novembre 2022 : clause d’indexation illicite réputée non écrite, limitation des effets au loyer non révisé
• CA Lyon, 25 juillet 2024 : la création de nouvelles fréquentations commerciales permet le déplafonnement
• Cass. civ. 3e, 2025 : nécessité de la neutralité de la clause et de la possibilité de révision à la baisse


FAQ sur la révision du loyer commercial


Quel indice pour réviser le loyer ?


Principalement l’ILC pour le commerce, l’ILAT pour le tertiaire, mais tout dépend de la nature de l’activité exercée.


Peut-on refuser une augmentation du loyer ?


Oui, si la demande n’est pas conforme (calcul, délai, non-respect de la procédure) ou si la valeur locative n’a pas augmenté. La contestation se fait devant le juge.


Un particulier peut-il demander l’augmentation dans un 3/6/9 ?


Oui, le statut du bailleur n’a pas d’importance : il doit respecter la procédure triennale et justifier sa demande.

Quel est le délai maximum pour réviser ?


Aucune limite pour demander, sauf prescription de 2 ans pour saisir le juge après notification. La révision n’est jamais rétroactive.


Comment déplafonner le loyer commercial ?


En prouvant une évolution substantielle (commercialité, durée du bail > 9 ans), ou par transformation majeure du local.


Déplafonnement : définition et application


Le déplafonnement signifie que le loyer n’est plus contraint par l’évolution de l’indice, mais fixé sur la base de la valeur locative réelle, contrôlée par le juge ou via expertise.


Les loyers commerciaux sont-ils plafonnés ?


Oui, en principe par l’application de l’indice, sauf exceptions précitées.


Quid du bail de 12 ans : déplafonnement ?


Oui, la durée supérieure à 9 ans ouvre systématiquement le droit au déplafonnement de plein droit.


Conseils pratiques pour bailleurs et preneurs


Anticiper les évolutions du marché


Mieux vaut réaliser, chaque année, une veille sur les indices publiés et l’environnement commercial du local. C’est le meilleur moyen d’adapter la stratégie et d’éviter les litiges.


Documenter chaque demande


Joignez des études de valeur locative, des chiffres de fréquentation, tout élément qui justifie la révision et sécurise la négociation.


Prévenir le contentieux : médiation et négociation


Dialoguez toujours avant de saisir le juge. Proposez des solutions amiables et encouragez une révision raisonnée.


Article rédigé par Guillaume Leclerc, avocat en contrats commerciaux et contentieux commerciaux à Paris.