Analyses juridiques et aide à la décision
12/11/25

Le devoir de vigilance européen : la nouvelle donne pour les entreprises

Le devoir de vigilance européen est une avancée majeure pour la gestion des risques éthiques et environnementaux des entreprises. Les PME, qu'elles soient concernées directement ou comme partenaires de grands groupes, doivent anticiper l’impact concret de ces obligations pour sécuriser leur activité, éviter les sanctions et renforcer leur compétitivité.

Qu’est-ce que le devoir de vigilance européen ?

C’est quoi la loi sur le devoir de vigilance ?

La loi sur le devoir de vigilance impose aux entreprises d’identifier, prévenir et atténuer les risques graves en matière de droits humains, d’environnement et de gouvernance dans toutes leurs activités et leur chaîne de valeur.

Elle a été introduite en France en 2017 et s’applique aujourd’hui au niveau européen à travers une directive ambitieuse. L’objectif : placer la prévention au cœur de la pratique des affaires pour garantir la responsabilité sociale et environnementale des acteurs économiques.

Quelle est la directive européenne sur le devoir de vigilance ?

La directive CS3D/CSDDD, adoptée en 2024, harmonise les règles en Europe. Elle impose un plan de vigilance, une évaluation régulière des partenaires, un mécanisme d’alerte et le suivi public des mesures. Toutes les entreprises au sein de l’UE, mais aussi leurs sous-traitants et fournisseurs, sont maintenant concernées.

Champ d’application et entreprises concernées

Quelles entreprises visées ?

La directive cible principalement les groupes de grande taille européens et non-européens ayant une activité significative dans l’UE. Mais pour les PME, la vigilance devient incontournable : toute PME sous-traitante de donneurs d’ordre concernés doit aussi démontrer sa conformité, sous peine d’être écartée des marchés.

Des dispositifs d’accompagnement, notamment financiers, sont prévus pour faciliter cette adaptation, notamment pour les PME.

Loi française sur le devoir de vigilance

La loi de 2017 concerne les groupes de plus de 5 000 salariés en France ou 10 000 dans le monde. Néanmoins, la pratique démontre que les exigences de vigilance s’appliquent à tous, par effet de chaîne.

Les obligations concrètes pour les PME

Les trois types de vigilance à intégrer

  • Vigilance sociale : garantir les droits humains, la sécurité au travail, éliminer le travail des enfants.
  • Vigilance environnementale : prévenir les pollutions, gérer durablement les ressources, respecter la réglementation sur les substances dangereuses.
  • Vigilance réglementaire : se conformer à la loi (transparence, lutte anticorruption – loi Sapin 2 – reporting fiable).

Exemple concret pour une PME

Imaginons une PME française sous-traitante d’un grand groupe. Elle doit :

  • Cartographier ses risques (ex : conditions de travail chez un partenaire étranger).
  • Mettre en place une alerte interne.
  • Intégrer une clause de vigilance dans ses contrats.

Exemple de clause :
« Le sous-traitant s’engage à justifier à première demande du respect de la réglementation sociale, environnementale et des droits humains, et à signaler sans délai tout manquement. En cas de non-conformité grave, le contrat pourra être suspendu ou résil

Vigilance dans la relation sous-traitant / donneur d’ordre

Devoir de vigilance du donneur d’ordre

Avant tout contrat (dès 5 000 € HT/an), le donneur d’ordre doit vérifier :

  • L’immatriculation légale (KBIS, registre des métiers)
  • L’attestation URSSAF de vigilance

Ces vérifications sont réalisées à la signature puis tous les six mois. Ne pas s’y conformer expose à de lourdes sanctions, et la jurisprudence récente l’a rappelé à plusieurs reprises.

Obligations de vigilance, sous-traitance et contentieux

En 2023, La Poste a été condamnée pour défaut de cartographie des risques et absence de suivi effet. Désormais, tout donneur d’ordre doit prouver l’évaluation effective de ses sous-traitants et le suivi de ses mesures. La responsabilité est partagée lors d’un manquement.

Le devoir de vigilance et la RSE

Quelles interactions entre vigilance et RSE ?

Les démarches de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) et le devoir de vigilance ont des objectifs proches : prévention des risques et transparence. Mais le devoir de vigilance est une obligation légale, assortie de sanctions et de contrôles, là où la RSE est souvent volontaire.

De plus en plus, le plan de vigilance sert de colonne vertébrale à la RSE des grands groupes et de leurs fournisseurs.

Compétitivité et valorisation

Mettre en avant ses mesures de vigilance permet à la PME de se distinguer, de sécuriser ses clients, d’accéder à des marchés publics et privés, et d’anticiper de futures évolutions réglementaires.

Contentieux et sanctions

Exemples de contentieux liés au devoir de vigilance

  • Total Energies, Suez et La Poste ont été poursuivis pour non-respect ou insuffisance de leur plan de vigilance.
  • En cas de manquement constaté, la justice peut ordonner l’indemnisation, imposer une astreinte financière, ou ordonner la publication forcée de la décision.

Sanctions possibles et responsabilité civile

La responsabilité peut remonter toute la chaîne, jusqu’à la maison-mère, au partenaire ou au fournisseur non conforme. Les sanctions incluent :

  • Astreinte
  • Amende proportionnelle au chiffre d’affaires
  • Réparation du dommage causé
  • Publication du jugement

Devoir de vigilance et loi Sapin 2 : articulation

La loi Sapin 2 vise essentiellement la prévention de la corruption, elle fonctionne en synergie avec la vigilance pour sécuriser les relations commerciales, le choix des partenaires et la formation du personnel.

FAQ – Devoir de vigilance européen

Que signifie le devoir de diligence ?

C’est la capacité d’anticiper, de détecter et de prévenir les risques majeurs. Cela implique des process internes solides et un dialogue régulier avec vos parties prenantes.

Quelle est la loi française sur le devoir de vigilance ?

Il s’agit de la loi du 27 mars 2017, imposant un plan de vigilance public et détaillé aux grands groupes.

Quels sont les trois types de vigilance ?

Sociale, environnementale, réglementaire (dont anticorruption).

Qu’est-ce que la directive européenne sur le devoir de vigilance ?

C’est une norme européenne de 2024 qui définit une méthodologie commune et prescriptive, à respecter par toutes les entreprises concernées et leurs partenaires.

Le devoir de vigilance s’applique-t-il à la sous-traitance ?

Oui. Le donneur d’ordre doit s’assurer de la conformité de ses sous-traitants et intégrer des clauses contractuelles précises.

Pourquoi la vigilance est-elle indispensable pour les PME ?

Pour accéder à certains marchés, sécuriser ses contrats, renforcer la confiance, éviter les sanctions, anticiper la législation, et développer une image de marque responsable.

Quelles condamnations récentes mettent en avant le devoir de vigilance ?

Exemple : La Poste en 2023 (défaut de cartographie des risques) et Total Energies (contentieux sur un projet en Afrique).

Devoir de vigilance et loi Sapin 2 : quelle différence ?

La vigilance porte sur les droits humains et l’environnement, la loi Sapin 2 cible la lutte anticorruption. Les mécanismes se recoupent dans la politique de conformité des grands groupes.

En quoi le devoir de vigilance complète la RSE ?

Il lui confère une force juridique ; la RSE devient, de fait, opposable et contrôlable, améliorant la transparence et la confiance.

Tableau comparatif

Critère Directive européenne Loi française Loi Sapin 2
Champ d’application Grandes entreprises + sous-traitance Groupes > 5 000 salariés France Toute entreprise (corruption)
Obligations Plan, évaluation, alerte, reporting Plan, publication annuelle Procédures, formation anticorruption
Sanctions Amende CA, astreinte, publication Indemnisation, astreinte, publicité Amendes, interdictions d’exercer
Sous-traitance Contrôle partenaires, traçabilité Attestation sociale et administrative Vérification des flux financiers

Pourquoi recourir à un avocat ?

Ce sujet réglementé suppose une analyse sur mesure : l’avocat veille à anticiper toutes les conséquences, à sécuriser vos relations et à actualiser vos pratiques selon les évolutions réglementaires ou la jurisprudence du moment. Il vous accompagne dans la rédaction des clauses, la gestion du risque et la réponse à toute mise en demeure.

Conclusion

Le devoir de vigilance européen n’est plus une option : c’est un atout de compétitivité, un rempart contre le contentieux, un signal fort envoyé à ses clients et partenaires.

Ne subissez pas la contrainte, faites-en un levier stratégique pour votre développement !

Article rédigé par Guillaume Leclerc, avocat en contrats commerciaux et contentieux commerciaux à Paris.