La clause de non-concurrence ne doit jamais être abusive – découvrez comment la zone géographique impacte sa validité, la jurisprudence récente, des exemples concrets et les recours possibles pour salariés et employeurs.
La clause de non-concurrence vise à protéger l’entreprise mais doit respecter l’équilibre des intérêts avec le salarié, notamment sur la question de la zone géographique. Découvrez comment éviter l’abus, comprendre la jurisprudence et sécuriser vos contrats.
La clause de non-concurrence est une stipulation contractuelle qui interdit à un ancien collaborateur d’exercer certaines activités professionnelles susceptibles de concurrencer son employeur, dans une zone géographique et pendant une durée déterminées, souvent moyennant une compensation financière.
Elle prend donc effet à la fin du contrat de travail, que la rupture résulte d’une démission, d’un licenciement (même pour faute grave), ou d’une rupture conventionnelle.
La jurisprudence a fixé des critères stricts et cumulatifs pour qu’une clause de non-concurrence soit valable :
• Être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise
• Être limitée dans le temps (généralement entre 6 mois et 2 ans selon la fonction)
• Être limitée à une zone géographique précise et proportionnée
• Tenir compte des spécificités de l’emploi et ne pas empêcher toute reconversion
• Prévoir une contrepartie financière réelle et non dérisoire
À retenir : Une clause ne respectant pas l’une de ces conditions pourra être considérée comme nulle, abusive ou réputée non écrite.
“Le salarié s’interdit, pendant une durée de 12 mois à compter de la cessation effective de son contrat de travail, d’exercer une activité concurrente, directement ou indirectement, dans un rayon de 50 kilomètres autour du siège social de l’entreprise. Cette obligation donne droit à une indemnité mensuelle fixée à 35% du salaire brut moyen perçu au cours des 12 derniers mois.”
La zone d’application doit être clairement définie et adaptée à l’activité du salarié. Il s’agit d’un des points les plus scrutés par les juges, car une zone trop large peut priver le salarié de toute opportunité professionnelle et rendre la clause abusive.
• Clause limitée à une agglomération, un département ou une région : généralement admise si l’entreprise exerce son activité sur ce territoire.
• Clause couvrant la France entière, voire le monde : considérée comme disproportionnée, sauf cas exceptionnels (par exemple, un cadre dirigeant qui couvrait effectivement tout le territoire national).
La Cour de cassation a annulé une clause s’appliquant à tout le territoire français, faute de justification suffisante et de proportionnalité avec la fonction du salarié (Cass. soc., 12 juillet 2002, n°00-45.135).
La zone retenue correspond-elle effectivement à la zone d’intervention réelle du salarié pendant le contrat ? Si la réponse est non, la clause risque d’être contestée.
Une clause est abusive si elle :
• Prévaut dans une zone géographique excessive
• S’applique sans véritable justification pour l’entreprise
• Dure excessivement longtemps
• Ne comporte pas (ou peu) de compensation financière
• Empêche le salarié de pouvoir retrouver un emploi dans son secteur.
• Clause interdisant toute activité concurrente sur la France entière pour un salarié n’ayant exercé que localement : annulée comme disproportionnée.
• Clause mondiale : systématiquement écartée en l’absence de justification très spécifique.
• Durée de 5 ans : excessive, non valide.
• Contrepartie dérisoire (ex : 5% du salaire) : clause annulée.
Pour un salarié occupant un poste clé à dimension internationale, une étendue géographique large pourrait être justifiée, à condition que la preuve rapportée soit convaincante et la rémunération correspondante suffisamment élevée.
Il n’existe pas de distance standard : la jurisprudence apprécie in concreto, selon l’activité de l’employeur, l’étendue du marché et la zone réellement couverte par le salarié.
• Définir la zone précisément (par commune, département, région, circonscription, nombre de kilomètres)
• S’assurer que le périmètre recouvre des zones où l’employeur a réellement des intérêts à protéger
• Éviter les formules du type « France entière » ou « mondial » sans justification évidente.
Un commercial intervenant sur l’Île-de-France ne saurait être lié par une clause interdisant toute activité de concurrence sur la France entière.
Les tribunaux considèrent qu’au-delà de deux ans, sauf exception, la durée devient excessive (ex : 5 ans systématiquement considérés comme abusifs).
La clause doit être adaptée :
• Plus la fonction est stratégique, plus la clause peut être large (dirigeants, commerciaux grands comptes…)
• Mais elle ne doit jamais interdire de facto toute possibilité d’emploi dans le secteur d’activité du salarié.
• Nullité ou inopposabilité de la clause : le salarié recouvre immédiatement sa liberté professionnelle.
• Indemnisation du salarié : si le salarié a respecté une clause abusive, il peut obtenir des dommages et intérêts.
Le Conseil de prud’hommes est compétent. Le juge va examiner le contrat, la réalité du périmètre d’intervention, le secteur couvert et la position de l’entreprise. Le salarié doit initialement démontrer que la clause ne répond pas à l’une des conditions de validité.
“Le salarié s’interdit, pendant 5 ans à compter de la rupture de son contrat de travail, d’exercer une activité similaire ou concurrente en France, en Europe ou dans le monde. Cette obligation ne prévoit aucune indemnité particulière.”
Cette rédaction a été plusieurs fois sanctionnée comme abusive pour durée excessive, absence de justifications sur la zone et défaut de contrepartie réelle.
“Le salarié s’engage, pour une durée d’un an suivant la cessation de ses fonctions, à ne pas exercer d’activité analogue chez un concurrent dans un rayon de 30 kilomètres autour de Paris. Cette obligation donne droit à une indemnité mensuelle correspondant à 35% de sa rémunération brute annuelle.”.
• Cass. soc., 10 juill. 2002, n° 00-45.135 : zone trop vaste, clause réputée nulle
• CA Paris, 17 novembre 2015, n°14/06639 : clause valable car limitée à l’Île-de-France pour un poste régional
• Cass. soc., 7 mai 2008, n°07-40.473 : clause annulée car la zone comprenait des régions où le salarié n’avait jamais exercé
La clause de mobilité concerne le changement du lieu de travail au sein de l’entreprise selon la zone prévue au contrat, alors que la clause de non-concurrence limite la possibilité d’exercer une activité à l’extérieur de l’entreprise, après la fin du contrat.
Pour être valable, la clause de mobilité doit :
• Préciser la zone d’application
• Être comprise dans le contrat et acceptée par le salarié
• Reposer sur un intérêt légitime
• Être proportionnée à la nature de l’emploi
En cas de clause abusive, le salarié peut réclamer :
• La nullité de la clause
• La restitution de la liberté professionnelle
• La réparation du préjudice subi (par exemple, dommages et intérêts pour perte de chance ou perte de revenus).
Le montant de l’indemnité prévue en contrepartie doit, en pratique, se situer autour de 30% du salaire brut (voire parfois davantage selon la jurisprudence et la convention collective applicable).
La zone doit être proportionnelle à la zone d’activité réelle du salarié. Plus elle est large sans vraie justification, plus la clause risque d’être jugée abusive.
Une clause est abusive si elle ne protège pas un intérêt légitime, si sa zone ou sa durée sont excessives, ou en cas d’indemnité dérisoire ou d’impossibilité de retrouver un emploi dans la spécialité du salarié.
• Définition claire de la zone
• Acceptation expresse par le salarié
• Intérêt légitime
• Proportionnalité avec le poste
Non, tout dépend du marché, du poste et de la réalité de l’activité, mais une zone doit toujours être limitée et justifiée.
La jurisprudence annule dans la quasi-totalité des cas une clause s’appliquant sur la France entière, sauf justification apportée par l’employeur sur un poste effectivement national ou international.
Le salarié peut demander l’annulation de la clause devant le Conseil de prud’hommes et obtenir éventuellement des dommages et intérêts pour le préjudice subi.
Il doit être significatif, souvent d’environ 30% du salaire brut de référence, mais certaines conventions collectives imposent davantage. Une contrepartie dérisoire entraînera l’annulation de la clause.
Encadrés pédagogiques et conseils pratiques
• Zone trop vaste sans justification
• Durée excessive (généralement plus de 2 ans)
• Clause « générique » sans précisions sur l’activité
• Contrepartie inexistante ou dérisoire
• Soyez précis sur le périmètre, la durée, la nature des activités concernées et la contrepartie financière
• Faites signer expressément la clause
• Ne transposez jamais une clause type sans adaptation au poste et au secteur
La clause de non-concurrence abusive, notamment en ce qui concerne la zone géographique, expose l’employeur à un fort risque de nullité et de contentieux prud’homal. Salariés comme entreprises ont intérêt à la négocier avec soin, en conservant toujours l’équilibre entre protection des intérêts de l’entreprise et liberté d’entreprendre du salarié ou dirigeant.
Guillaume Leclerc, avocat au Barreau de Paris en contrats commerciaux et contentieux des affaires.
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