Commercial contracts
12/11/25

Clause de préemption : Guide pratique et complet pour dirigeants de PME

Tout comprendre sur la clause de préemption : définition, fonctionnement, rédaction, différences avec la clause d’agrément, exemples, enjeux pour PME. Article par Guillaume Leclerc, avocat en contrats commerciaux et contentieux commerciaux à Paris.

Introduction : Pourquoi la clause de préemption est incontournable en PME

Dans le monde des affaires, garantir la stabilité du capital ou préserver la maîtrise de la composition des associés est un enjeu vital pour de nombreux dirigeants de PME. C’est précisément pour répondre à ces défis qu’est prévue la clause de préemption. Véritable « garde-fou », cette clause s’inscrit dans les statuts ou contrats pour organiser et contrôler la transmission des parts sociales ou actions au sein d’une société. Cet article propose un panorama complet et pédagogique de la clause de préemption, enrichi d’exemples pratiques et de réponses aux questions récurrentes.

Qu’est-ce qu’une clause de préemption ?

Définition de la clause de préemption

La clause de préemption est une stipulation contractuelle qui confère à certaines personnes (généralement les associés ou actionnaires) un droit prioritaire d’acquérir un bien – le plus souvent des titres sociaux (actions, parts de société) – avant que celui-ci ne soit cédé à un tiers extérieur. Elle s’oppose donc à une liberté totale de cession, en faveur d’une organisation réfléchie de la transmission des droits.

Exemple concret :
Dans une SARL, une clause de préemption insérée dans les statuts prévoit que tout associé souhaitant céder ses parts doit d’abord proposer l’achat à ses coassociés selon les modalités définies contractuellement

Origine et fondement juridique

La clause n’est pas expressément encadrée par le code civil mais découle du principe de la liberté contractuelle (article 1102 du Code civil) et est courante dans le droit des sociétés. Elle s’appuie aussi sur la notion de « préférence » en matière de cession de droits sociaux.

Différence avec le droit de préemption légal

Il ne faut pas confondre la clause de préemption contractuelle avec le droit de préemption légal, qui trouve sa source dans la loi (ex : droit de préemption urbain, droit de préemption du locataire commercial, etc.). Pour approfondir ces aspects, consulter également notre dossier sur le droit de préemption, comprendre un levier essentiel en droit immobilier et commercial.

Fonctionnement de la clause de préemption

Le mécanisme étape par étape

La clause de préemption, pour être efficace, doit prévoir le formalisme suivant :

  1. Notification de l’intention de céder : L’associé ou actionnaire cédant informe les bénéficiaires (souvent les autres associés) de son projet de cession et des conditions principales (prix et identité du tiers).
  2. Exercice du droit de préemption : Les bénéficiaires disposent d’un délai pour se prononcer (souvent 30 à 60 jours). En cas d’acceptation, la cession s’opère à leur profit, aux conditions notifiées.
  3. Transfert effectif : Si aucun bénéficiaire n’exerce le droit, la cession peut alors être réalisée au profit du tiers extérieur.

Encadré pédagogique :

À retenir : Pour que la clause de préemption ne soit pas contournée, il est impératif qu’elle soit rédigée de façon précise et qu’elle s’applique à toute opération assimilable à une transmission (vente, donation, apport…).

Sanction du non-respect de la clause

Si une cession intervient en violation de la clause de préemption (ex : vente directe à un tiers sans notification préalable), celle-ci risque d’être annulée par le juge sur demande des associés lésés, ou peut permettre une action en responsabilité contre le cédant. La jurisprudence sanctionne régulièrement ce détour.

Exemple jurisprudentiel :
Dans un arrêt de la Cour de cassation (Com., 9 juillet 2013, n°12-19.204), les juges ont rappelé que la cession faite en méconnaissance d’une clause de préemption pouvait être annulée sauf si le tiers pouvait se prévaloir de sa bonne foi (ignorance légitime de la clause).

Objet de la clause de préemption

Sur quels biens peut-elle porter ?

  • Titres de société : parts sociales, actions
  • Biens immobiliers (cas plus rare en pratique)
  • Autres actifs spécifiques (droit au bail, fonds de commerce, etc.)

En droit des sociétés, les clauses de préemption concernent principalement la cession des titres pour préserver la stabilité du groupe d’associés.

Dans quels contrats et statuts l’insérer ?

  • Statuts de société : recommandée en SARL, SAS, SA…
  • Pactes d’actionnaires ou d’associés : permet de fixer des conditions supplémentaires sans modifier les statuts (souvent pratiqué en SAS)
  • Contrats de distribution, partenariats…

Exemple :
Dans une SA, les statuts peuvent prévoir que toute cession d’actions à des tiers est précédée d’une notification aux autres actionnaires, qui disposent d’un mois pour exercer la préemption.

Les différentes variantes de la clause de préemption

Préemption « en chaîne » ou multiple

La clause peut prévoir plusieurs niveaux bénéficiaires (associés, puis société elle-même, puis tiers désignés…), structurés selon l’importance des intérêts à protéger.

Préemption croisée

Entre plusieurs sociétés ou groupes partenaires, la clause pourra prévoir que chaque société bénéficie d’un droit de priorité en cas de cession croisée de participations.

Rédaction efficace de la clause de préemption

La phase de rédaction est cruciale pour anticiper les problèmes de mise en œuvre et garantir l’opposabilité du mécanisme :

Les points clés à préciser

  • Champ d’application (transmissions concernées)
  • Bénéficiaires
  • Modalités de notification et délai pour exercer la préemption
  • Prix et conditions d’acquisition
  • Conséquences en cas d’inaction ou de refus

Exemple de clause de préemption (SARL/SAS)

xml
Exemple :
« Toute cession de parts sociales à un tiers non associé, quelle qu’en soit la forme, doit être préalablement notifiée à l’ensemble des associés par lettre recommandée avec accusé de réception. Ceux-ci disposent d’un délai de 30 jours à compter de la notification pour exercer leur droit de préemption, au prix et conditions envisagés pour la cession au tiers. À défaut de réponse dans ce délai, ils sont réputés avoir renoncé à leur droit de préemption. »

Conseils de rédaction et précautions

  • Veillez à définir précisément les modalités et à anticiper les exceptions légitimes (transmissions entre membres d’une même famille, par exemple).
  • Prévoyez des mesures contre l’abus de majorité ou le blocage des opérations.

Clause de préemption et autres clauses voisines : comparaison

Différence entre clause de préemption et clause d’agrément

Critère Clause de préemption Clause d'agrément
Définition Droit prioritaire d’acquérir les titres avant qu’ils ne soient cédés à un tiers Soumission de la cession à l’autorisation préalable d’un organe ou de la collectivité d’associés
But Permet de conserver la maîtrise des associés au sein de la société Permet de contrôler l’entrée de tout nouvel associé
Mise en œuvre Offre obligatoire aux bénéficiaires avant toute réalisation de la cession Décision d’un organe (gérants, assemblée générale) d’accepter ou refuser le nouvel acquéreur
Types concernés SARL, SAS, SA, SNC, etc. SA (statuts), SARL (obligatoire pour cessions à tiers), SAS
Sanction Annulation possible de la cession en cas de violation Nullité de la cession en cas de non-respect

Clause de préférence et clause de préemption

La clause de préférence est également proche mais se distingue par le fait qu’elle porte sur tout projet de cession, sans qu’une offre concrète d’un tiers ne soit nécessaire pour la déclencher.

La clause de préemption dans les principales sociétés françaises

Clause de préemption en SARL

La clause est fréquente en SARL pour compléter le régime d’agrément légal et renforcer le contrôle protecteur des associés.

Clause de préemption en SA

En SA, la clause doit se concilier avec le principe de la libre cessibilité des actions – un aménagement statutaire précis est requis.

Clause de préemption en SAS

Souplesse : tout est négociable et personnalisable entre actionnaires grâce à la liberté statutaire et aux pactes d’actionnaires.

Société Régime Possibilité d’insertion de clause
SARL Règlementée Oui (statuts)
SA Libre en principe Oui (avec limites)
SAS Très souple Oui (statuts ou pacte)

Avantages et limites pour les PME

Les points forts pour le dirigeant

  • Préserver la stabilité de l’actionnariat, notamment dans une PME familiale ou détenue par des associés historiques.
  • Garantir la pérennité de la vision commune et anticiper les surprises liées à l’entrée de nouveaux arrivants.

Limites et risques

  • Peut freiner la liquidité des titres, parfois dissuasive en cas de besoin urgent de sortie.
  • En cas de mésentente entre associés, la clause peut devenir source de blocage.

Précautions et conseils pratiques : faites-vous accompagner

La rédaction et la mise en œuvre de la clause de préemption sont éminemment stratégiques et juridiques. Cette matière est réglementée et appelle à la plus grande vigilance : l’accompagnement par un avocat s’impose pour adapter la clause à la situation de votre société, prévenir les contentieux éventuels et garantir la sécurité juridique de l’opération.

FAQ sur la clause de préemption

Qu’est-ce qu’une clause de préemption ?

C’est une clause contractuelle qui vous permet, en tant qu’associé, de racheter en priorité les parts/action d’un autre associé avant toute vente à un tiers. Elle protège ainsi la cohésion du groupe.

Quelle est la différence entre clause d’agrément et clause de préemption ?

La clause d’agrément soumet la vente de titres à l’approbation d’un organe social. La clause de préemption, elle, offre aux associés la possibilité d’acheter avant toute vente à un tiers.

Comment se passe un droit de préemption ?

Le cédant notifie ses intentions et conditions aux bénéficiaires, qui disposent alors d’un délai pour faire connaître leur intention de préempter.

Peut-on insérer une clause de préemption dans tous types de sociétés ?

Oui, mais ses modalités diffèrent selon la forme de la société. La rédaction doit toujours être adaptée à la structure de la société (SARL, SA, SAS…).

Quelles sont les sanctions en cas de non-respect ?

La cession peut être annulée, ou le cédant peut voir sa responsabilité engagée à l’égard des bénéficiaires lésés. Le tiers de bonne foi est généralement protégé, mais la jurisprudence évolue sur ce point.

Existe-t-il des clauses similaires ?

La clause de préférence et la clause d’agrément sont proches, mais répondent à des logiques différentes (préférence = engagement de proposer en priorité, agrément = nécessité d’une autorisation).

Où puis-je approfondir la question du droit de préemption ?

Consultez l’article dédié sur le droit de préemption.

Article rédigé par Guillaume Leclerc, avocat en contrats commerciaux et contentieux commerciaux à Paris.