Découvrez l’essentiel sur la prescription des factures entre professionnels et particuliers : délais, point de départ, exceptions, conséquences et recours. Un guide complet rédigé par un avocat, illustré par des exemples pratiques et les articles de loi les plus récents
La question de la prescription d’une facture impayée est cruciale pour tout professionnel ou consommateur. Comprendre les délais, le point de départ, les acteurs concernés et les mécanismes d’interruption ou de suspension vous permet d’éviter l’irrecevabilité d’une action en paiement et de sécuriser vos créances.
La prescription correspond à la période légale au-delà de laquelle aucune action judiciaire n’est recevable pour exiger le paiement d’une créance. Passé ce délai, le débiteur peut invoquer la prescription pour se libérer de sa dette.
Encadré pédagogique :
« La prescription protège la sécurité juridique et favorise la clarté des relations commerciales. Elle sanctionne l’inaction : un professionnel non diligent peut perdre son droit au paiement. »
Le délai de prescription entre professionnels est en principe de 5 ans (article L110-4 du Code de commerce et 2224 du Code civil).
• Il court à compter du jour de l’exigibilité de la créance (généralement, le lendemain de la date d’échéance de la facture).
• Exemple pratique : Une facture émise le 1er mars 2021 avec échéance au 1er avril 2021, le délai de prescription commence le 2 avril 2021. Il expire le 2 avril 2026.
Des secteurs spécifiques (travaux publics, assurances, énergie, ventes internationales) peuvent imposer des délais différents. Pensez à vérifier les textes spéciaux applicables à votre domaine.
Jurisprudence :
• Cass. Com., 6 déc. 2011, n° 10-23466 : seul l’acte d’assignation interrompt la prescription, pas la requête en injonction.
Le délai est réduit à 2 ans conformément à l’article L218-2 du Code de la consommation.
• Il s’applique dès lors que le débiteur est un particulier ou « non-professionnel ».
• Ce délai court à compter du jour où la créance devient exigible : c’est généralement la date d’achèvement des travaux ou de livraison.
Encadré pratique :
« Un artisan ayant installé une cuisine chez un particulier le 15 janvier 2023 peut agir jusqu’au 15 janvier 2025 pour réclamer le paiement de la facture. »
La jurisprudence exige que le délai de prescription débute à la date d’exigibilité réelle de la créance, c’est-à-dire généralement la date de réalisation de la prestation ou de la livraison, et non la date d’établissement de la facture.
La prescription peut être interrompue par :
• Une reconnaissance de dette du débiteur (ex : paiement partiel ou écrit officiel)
• L’introduction d’une action en justice
Chaque interruption fait courir un nouveau délai à partir de la date d’interruption.
La suspension « gèle » le délai temporairement (médiation, conciliation, tutelle…). Une fois la période de suspension levée, le délai reprend là où il s’était arrêté.
Le créancier ne pourra plus contraindre le débiteur à payer par voie judiciaire une fois le délai expiré, sauf médiation ou négociation amiable.
Encadré :
« La prescription est un moyen de défense absolu, même en présence d’une dette avérée. »
Il pourra invoquer la prescription pour opposer le paiement, quel que soit le montant ou l’importance historique de la facture. Il appartient au juge de constater la prescription si le débiteur soulève ce moyen.
Si la prestation est réalisée mais la facture est établie tardivement, la prescription court dès l’exigibilité de la créance (et non la date d’envoi de la facture).
Dans le cadre d’un particulier, la prescription commence à l’achèvement de la prestation. Une facture reçue deux ans après les travaux sera irrecevable en l’absence d’action judiciaire dans le délai.
Le professionnel doit agir avant la fin du délai, sous peine de voir sa demande déclarée prescrite. En pratique, la délivrance d’une assignation au tribunal interrompt le délai immédiatement. La requête en injonction de payer, quant à elle, n’est pas suffisante pour l’interruption : seule la signification de l’ordonnance en justice compte.
Exemple de clause contractuelle :
« Les actions en paiement du prix seront soumises au délai légal de prescription applicable en vertu de la qualité du débiteur (professionnel ou particulier). Toute reconnaissance de dette, paiement partiel ou action judiciaire entraînera l’interruption du délai de prescription. »
• 5 ans entre professionnels
• 2 ans entre professionnel et particulier
• Le lendemain de la date d’exigibilité de la créance, souvent la date d’échéance mentionnée sur la facture ou la fin de la prestation.
• Régimes spécifiques : travaux publics, assurances, énergie, droit international privé, etc.
• Suspension ou interruption par négociation, action en justice, reconnaissance de dette.
Oui : toute personne poursuivie peut solliciter la prescription pour se soustraire au paiement, à condition qu’aucune action judiciaire ou reconnaissance n’ait interrompu le délai.
Le professionnel ne peut plus exiger le paiement : son action en justice sera irrecevable, sauf négociation amiable ou médiation volontaire.
Oui, par action en justice, reconnaissance de dette, médiation ou procédure collective… Le délai recommence alors à courir à zéro.
La prescription des factures entre professionnels et entre professionnel et particulier est une sécurité juridique primordiale, mais aussi une arme redoutable pour le débiteur. Une vigilance constante est indispensable dès l’émission de la facture et tout au long du processus de recouvrement. Ne négligez jamais vos délais légaux et privilégiez la traçabilité documentaire.
Guillaume Leclerc, avocat en contrats commerciaux et contentieux commerciaux à Paris.