Agences marketing, social media managers, créateurs de contenus Instagram et TikTok : tout savoir sur la loi influenceurs, les contrats, les mentions obligatoires et les statuts pour sécuriser vos collaborations commerciales. Guide complet pour dirigeants, créateurs de contenus et influenceurs.

Le marketing d’influence est devenu un levier quotidien pour les agences marketing, les social media managers et les dirigeants d'entreprises, mais le cadre juridique s’est considérablement durci depuis la loi du 9 juin 2023 dite « loi influenceurs » et les mises à jour des recommandations de l’ARPP en 2024.
Pour une agence ou un créateur de contenus, une collaboration mal cadrée avec un créateur de contenus peut engager votre responsabilité au même titre que celle de l’influenceur, avec des risques de sanctions administratives, pénales et de bad buzz durable. Cet article vous donne une vision très opérationnelle du cadre légal, des bonnes pratiques contractuelles et des statuts possibles pour les créateurs de contenus, afin de sécuriser vos campagnes Instagram, TikTok et autres réseaux sociaux.
La loi du 9 juin 2023 encadre l’« influence commerciale » et vise expressément à responsabiliser à la fois les influenceurs et les annonceurs, c’est-à-dire les marques et, en pratique, leurs agences. En cas de pratiques commerciales trompeuses, de non-respect du droit de la consommation ou de promotion de services interdits (par exemple certains produits financiers spéculatifs), les sanctions administratives et pénales peuvent viser conjointement l’influenceur et le donneur d’ordre.
Concrètement, une story TikTok non signalée comme sponsorisée, présentant un produit avec des allégations trompeuses, peut entraîner :
Les créateurs de contenus Instagram, TikTok, YouTube ou Twitch ne sont plus seulement des « influenceurs », mais de véritables partenaires business qui participent à la construction de votre image de marque. Une agence marketing ou un dirigeant de société qui structure correctement ces collaborations (contrats, mentions, statut du créateur) se donne un avantage concurrentiel : meilleure prévisibilité, moins de litiges, et une crédibilité renforcée auprès de ses propres clients.
À l’inverse, se contenter de simples échanges de mails ou de DM Instagram pour organiser un partenariat vous expose à :
L’ARPP et la doctrine distinguent traditionnellement l’« influenceur » comme une personne disposant d’une audience significative, capable d’orienter les comportements de son public, notamment via des collaborations commerciales avec des marques. Le « créateur de contenu » est une notion plus large, qui vise toute personne produisant des contenus originaux (vidéos, photos, textes, streams) sur les plateformes, avec ou sans dimension publicitaire ; dès qu’il est rémunéré (en argent ou en nature) pour mettre en avant un produit ou un service, il entre dans le champ de l’influence commerciale.
Pour une société ou une agence, cette distinction est surtout utile pour :
L’ARPP considère qu’il y a « collaboration commerciale » dès lors que trois conditions cumulatives sont réunies : engagement réciproque, contrepartie (financière ou en nature) et intention de promouvoir un produit ou un service. La loi influenceurs reprend cette logique en visant les contenus dans lesquels un créateur fait la promotion d’un bien ou d’un service en contrepartie d’un avantage, même si celui-ci est uniquement en nature (cadeaux, voyages, produits gratuits…).
Exemple concret :
Dès qu’il y a collaboration commerciale au sens ARPP et loi influenceurs, le créateur doit faire apparaître une mention claire de la nature publicitaire de la communication, immédiatement perceptible par l’internaute. Les mentions « publicité », « collaboration commerciale » ou « en partenariat avec [nom de la marque] » sont considérées comme adéquates, à condition d’être lisibles, en début de contenu et non noyées dans les hashtags.
Les bonnes pratiques recommandées :
La loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 encadre l’influence commerciale afin de lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux. Elle impose notamment : la contractualisation écrite des relations entre influenceurs et annonceurs ou agences, l’obligation d’identification claire des collaborations commerciales, des restrictions sur certains produits ou services, et un régime de sanctions renforcé.
Pour un créateur de contenus, une société ou une agence social media, cela implique de revoir en profondeur :
Un an après l’entrée en vigueur de la loi, l’ARPP a actualisé en 2024 sa fiche pratique « Communication d’influenceurs et marques » pour l’aligner sur ce nouveau cadre et renforcer l’approche pédagogique. Cette fiche rappelle notamment l’obligation d’identification immédiate de la nature publicitaire des contenus et propose des exemples concrets de mentions acceptables, en coordination avec le Guide de bonne conduite publié par Bercy.
Les agences marketing ont désormais intérêt à :
En cas de non-respect des règles de transparence (absence de mentions « publicité » ou « collaboration commerciale »), les pratiques peuvent être qualifiées de commerciales trompeuses par omission, avec des sanctions pénales pouvant aller jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 300 000 euros d’amende, voire davantage en proportion du chiffre d’affaires. Des sanctions administratives peuvent également être prononcées par la DGCCRF, qui a montré sa vigilance sur les contenus d’influence, notamment en matière de dropshipping, de produits minceur ou de formations en ligne.
Au-delà de la sanction juridique, le risque réputationnel est majeur :
Le créateur de contenu peut relever de plusieurs statuts selon la nature de ses revenus (droits d’auteur, prestations de services, vente de formations, etc.). Les deux statuts les plus fréquents en France sont le régime des artistes-auteurs (pour les activités principalement de création d’œuvres originales) et la micro-entreprise (pour les prestations de services et la monétisation plus « entrepreneuriale » de l’audience).
En pratique :
Pour se déclarer, le créateur doit identifier la nature principale de son activité et choisir le statut correspondant, avant de procéder à son immatriculation auprès de l’URSSAF compétente. Pour une micro-entreprise, la démarche se fait en ligne via le guichet unique, avec obtention d’un numéro SIRET et déclaration du chiffre d’affaires, tandis que pour un artiste-auteur, l’inscription se fait via l’URSSAF artistes-auteurs (URSSAF Limousin) avec déclaration des revenus en BNC.
Pour les agences, influenceurs et sociétés, il est prudent :
Les revenus d’un créateur Instagram varient fortement en fonction de son nombre d’abonnés, de son taux d’engagement, de sa niche et de la valeur perçue de son audience par les marques. Les études de marché montrent des écarts considérables, allant de quelques centaines d’euros par publication pour des micro-influenceurs à plusieurs dizaines de milliers d’euros pour des créateurs stars, avec en plus des revenus complémentaires issus de l’affiliation, des formations ou de la vente de produits dérivés.
Pour une société, l’enjeu n’est pas tant le « salaire moyen » que la cohérence économique de la collaboration :
La loi influenceurs impose la conclusion d’un contrat écrit entre l’influenceur et son agent et/ou le donneur d’ordre pour toute opération d’influence commerciale. Ce contrat doit comporter un certain nombre de mentions obligatoires, notamment l’identification des parties, la nature des missions, la rémunération, les obligations de transparence et les éventuelles restrictions liées au contenu.
Pour une agence marketing ou une société, cela signifie que :
Un partenariat « propre » avec un créateur doit couvrir au minimum : l’objet de la collaboration (influence ou simple création de contenus), le périmètre des livrables, la rémunération, les mentions obligatoires, la propriété intellectuelle, la confidentialité, la durée et la résiliation. Les clauses doivent être adaptées au contexte digital : stories éphémères, réutilisation de contenus en publicité payante, possibilité de faire évoluer les briefs en cours de campagne, etc.
Exemples d’éléments à prévoir :
À titre illustratif, une clause peut prendre la forme suivante (à adapter au cas par cas) :
« Le Créateur s’engage, pour chaque Publication réalisée dans le cadre des présentes, à mentionner de manière claire, lisible et immédiatement identifiable par tout internaute, la nature publicitaire de la collaboration, au moyen de la mention “Publicité” et/ou “Collaboration commerciale avec [Nom de la marque]”, en début de publication ou de description, ainsi que par l’utilisation des dispositifs natifs mis à disposition par la plateforme concernée (tels que le label “Partenariat rémunéré”, “Publicité” ou tout équivalent). Le Créateur garantit que ces mentions resteront visibles pendant toute la durée d’accessibilité de la Publication. »
Cette clause peut être complétée par :
Le client (marque ou société) a lui aussi une obligation de collaboration loyale dans l’exécution du contrat, qui peut être utilement formalisée. Il doit notamment fournir des informations exactes sur les produits ou services, confirmer la conformité de ceux-ci à la réglementation applicable (par exemple en matière de santé, de finance, de jeux d’argent) et valider les contenus dans des délais cohérents.
Une clause peut prévoir que :
Pour une agence marketing ou une société, respecter quelques règles d’or permet de concilier performance business et sécurité juridique. Ces règles incluent : la transparence des partenariats, la conformité des messages au droit de la consommation, la protection des données personnelles (RGPD) et la vigilance sur l’image de marque associée au créateur.
Bonnes pratiques :
Les principales plateformes ont développé des outils natifs pour identifier les contenus sponsorisés : label « Partenariat rémunéré » sur Instagram, case « Inclut une promotion payée » sur YouTube, badge « Publicité » via l’outil « Branded Content » sur TikTok. Ces outils facilitent la transparence, mais ne dispensent pas le créateur de mentionner explicitement la collaboration dans le texte et, le cas échéant, à l’oral.
Il est recommandé de prévoir contractuellement que le créateur :
Dès que la campagne d’influence implique le suivi des performances (UTM, tracking, cookies, codes promo, collecte d’e-mails via des jeux-concours…), les obligations issues du RGPD et du droit de la prospection électronique s’appliquent. La marque et l’agence doivent notamment informer les internautes des cookies ou trackers utilisés, recueillir le consentement lorsque nécessaire et encadrer contractuellement la circulation des données (par exemple entre l’agence, la marque et le créateur).
Pour se sécuriser :
L’influenceur est un créateur de contenu disposant d’une audience significative et qui exerce une influence sur le comportement de consommation de son public, notamment en valorisant des produits ou services. Le créateur de contenu, au sens large, peut produire des contenus sans nécessairement réaliser de collaborations commerciales ; dès qu’il est rémunéré (en argent ou en nature) pour promouvoir une marque, il entre dans le champ de l’influence commerciale et donc dans celui de la loi influenceurs.
La loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 encadre l’influence commerciale et lutte contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux. Elle impose notamment la conclusion de contrats écrits, l’obligation de transparence sur les collaborations commerciales, des restrictions sectorielles (par exemple pour certains produits financiers ou médicaux) et un régime de sanctions renforcé en cas de pratiques trompeuses.
Le statut dépend de la nature des revenus et de l’organisation de l’activité : artistes-auteurs pour des revenus principalement issus de créations originales, micro-entreprise pour des prestations de services ou de sponsoring, voire société (SASU, EURL, etc.) pour une activité structurée. Le choix du statut a des conséquences en termes de cotisations sociales, de fiscalité et de protection sociale, et doit être envisagé en lien avec un conseil juridique et/ou un expert-comptable.
Il n’existe pas de « salaire standard » pour un créateur Instagram ; les études de marché font état de rémunérations très variables, allant de quelques centaines d’euros par post pour des micro-influenceurs à plusieurs dizaines de milliers d’euros pour des comptes majeurs. À ces montants s’ajoutent souvent des revenus complémentaires provenant de l’affiliation, de la vente de produits ou de formations, de sorte que le revenu global dépend autant de la monétisation que de la taille de l’audience.
Pour se déclarer, le créateur doit identifier la nature principale de son activité (artistique, prestation de service, vente de produits) puis effectuer les démarches correspondantes (déclaration d’activité d’artistes-auteurs auprès de l’URSSAF artistes-auteurs, ou immatriculation en micro-entreprise/société via le guichet unique). Une fois immatriculé, il devra facturer ses prestations (ou céder ses droits d’auteur) et déclarer ses revenus aux organismes sociaux et fiscaux compétents.
Une collaboration commerciale est caractérisée lorsqu’un contenu est réalisé dans le cadre d’engagements réciproques, que le créateur reçoit une contrepartie (monétaire ou en nature) et que le contenu vise à promouvoir un produit ou un service. Dans ce cas, le contenu doit être identifié comme « publicité » ou « collaboration commerciale », avec des mentions claires et immédiates pour l’internaute.
La mention est obligatoire dès qu’il existe une collaboration commerciale au sens de la loi et des recommandations de l’ARPP, c’est-à-dire dès qu’il y a contrepartie et intention de promouvoir. La mention doit figurer dès le début du contenu (post, story, vidéo, live) et être lisible, par exemple « Publicité – Collaboration commerciale avec [Marque] », complétée par les labels natifs des plateformes.
L’obligation de collaboration du client (marque notamment) signifie qu’il doit fournir au créateur toutes les informations utiles sur les produits, répondre aux demandes de validation et garantir la conformité des éléments fournis. En cas d’information trompeuse fournie par la marque, celle-ci peut être tenue responsable des sanctions ou des préjudices subis par le créateur.
Un partenariat d’influence réussi suppose un contrat clair, une vérification préalable du statut et de la réputation du créateur, des briefs précis, des mentions légales respectées et un suivi des performances aligné sur le RGPD. Il est plus sûr de raisonner en coût par objectif (trafic qualifié, leads, ventes) qu’en simple prix par publication, pour éviter les désalignements entre la marque et le créateur.
Les règles d’or incluent : la transparence des partenariats, la conformité des messages au droit de la consommation, la gestion proactive des risques (secteurs sensibles, jeunes publics), le respect du RGPD et la cohérence entre l’image du créateur et celle de la marque. Une société qui documente ses process (check-list, modèles de contrats, guidelines internes) et se fait accompagner juridiquement réduit fortement le risque de contentieux ou de sanction.
Le marketing d’influence et les collaborations avec des créateurs de contenus se situent au croisement du droit de la consommation, du droit de la publicité, du droit social, de la propriété intellectuelle et de la protection des données. Les textes évoluent rapidement (loi influenceurs, recommandations ARPP, pratiques des plateformes), ce qui rend nécessaire l’intervention d’un avocat pour adapter vos contrats, vos process et vos campagnes à votre activité spécifique (secteur, cible, pays visés, plateformes utilisées).
Un accompagnement juridique permet notamment de :
Article rédigé par Guillaume Leclerc, avocat en contrats commerciaux et contentieux commerciaux à Paris. J'interviens quotidiennement pour des agences marketing et de social media (marketing et réglementation des réseaux sociaux), ainsi que pour des créateurs de contenus, en France, à Dubaï et à partout à l'international.